La Ligue de l'enseignement place la laïcité au cœur de ses fondements doctrinaux, entendue comme opposition à toute hétéronomie, comme support à l'émancipation des citoyens afin que ceux-ci puissent déterminer en toute liberté le destin commun de la Cité. Elle n'entend pas pour autant la notion comme neutre axiologiquement. Au contraire, l'organisation défend l'enseignement et la diffusion au sein de la société d'une morale laïque, susceptible d'une part de proposer aux non religieux des valeurs et une éthique, récusant dès lors tout monopole du religieux dans ces domaines ; d'autre part, de servir de support à une charte laïque, entendue comme fondement commun aux religions comme au non religieux pour établir un contrat social réunissant l'ensemble de la société, quelque soient la croyance des citoyens, leur philosophie, leur appartenance culturelle. Entendue largement, cette morale laïque intègre des notions telles que la justice sociale, l'égalité, la liberté, etc.
En défendant l'instauration d'une morale laïque, l'organisation souhaite participer à la définition des valeurs sociétales et à l'élaboration du socle commun constitutif de la Cité. Elle se veut ainsi représentative du non religieux, par une légitimité fondée d'une part sur son nombre d'adhérents, sa force de mobilisation et son volume d'activité ; d'autre part sur la fonction qu'elle exerce au sein de la société : celle d'une vigilance citoyenne pour le respect du modèle républicain laïque de la citoyenneté, refusant en ce sens toute institutionnalisation des droits collectifs.
Notre contribution vise à étudier la Ligue de l'enseignement comme vecteur d'intégration et de production du non religieux, à travers principalement la morale laïque qu'elle défend, la charte de la laïcité qu'elle propose à la Cité et le modèle de citoyenneté républicain qu'elle appuie et dont elle veille à la stricte application à une période où les exigences de reconnaissance identitaire, notamment religieuse, sont croissantes.